Après plusieurs jours d'hésitation, Aria prit enfin la décision de se rendre au royaume de Kyanit pour affronter son père, le roi Edgard. Elle savait que cette rencontre serait éprouvante, mais elle ne pouvait plus fuir.
Dès son arrivée, Greg l'attendait à l'entrée du palais. Sans un mot, il l'invita à le suivre à travers les longs couloirs silencieux du château. L'atmosphère était pesante, comme si le lieu lui-même portait le poids des erreurs du passé.
Ils arrivèrent devant une chambre gardée par deux soldats en armure. À leur approche, l'un d'eux ouvrit la porte et leur fit signe d'entrer.
À l'intérieur, Aria sentit son souffle se couper.
Edgard était allongé sur un lit imposant, mais son apparence n'avait plus rien de royal. Son teint était livide, sa peau marquée par la fatigue et la maladie. Ses joues creusées et ses lèvres sèches trahissaient la douleur qui rongeait son corps. Chaque respiration semblait être un effort surhumain. Ses yeux, autrefois perçants et dominateurs, étaient désormais éteints, hantés par un mélange de souffrance et de regrets.
Un frisson parcourut Aria. Elle ne s'était jamais attendue à voir son père dans un état aussi misérable. Une étrange pitié naquit en elle, malgré tout le ressentiment qu'elle lui portait.
Greg s'approcha du lit et posa doucement une main sur l'épaule du roi.
— Edgard…
Le roi ouvrit lentement les yeux. Sa voix, lorsqu'elle s'éleva, était faible, presque un murmure.
— Greg…
— Aria est là.
À ces mots, Edgard voulut se redresser brusquement, mais une violente quinte de toux l'arrêta. Il grimaça sous la douleur, peinant à retrouver son souffle.
— Doucement, le prévint Greg en l'aidant à s'asseoir en le soutenant par les épaules.
Lorsqu'il fut enfin installé, Greg recula légèrement.
— Je vais vous laisser.
Edgard hocha lentement la tête.
— Merci… Greg.
Sans un mot de plus, Greg quitta la pièce, laissant Aria seule face à son père.
Un silence pesant s'installa. Aria croisa les bras, fixant Edgard d'un regard dur.
— Tu remercies les gens maintenant ? ironisa-t-elle. Ce n'est pas dans tes habitudes.
Un sourire fatigué étira les lèvres du roi.
— Crois-le ou non, ma fille… j'ai appris de mes erreurs.
Mais Aria détourna le regard, boudeuse.
Edgard l'observa en silence avant de soupirer.
— Je sais que tu me hais de tout ton cœur… et c'est normal. J'ai été un monstre. Toute ma vie, j'ai cru que la force et la violence suffisaient à tout régler. Mais aujourd'hui, je réalise à quel point j'avais tort… J'ai maltraité tous ceux qui m'aimaient, y compris ta mère.
Aria se raidit à la mention de sa mère.
— Elle m'aimait profondément, continua Edgard, mais mon orgueil l'a fait fuir. Et au lieu d'en tirer une leçon, j'ai préféré recourir à encore plus de force… ce qui a fini par causer sa mort.
Sa voix se brisa sur ces derniers mots.
— J'ai fait tant de choses impardonnables… et pourtant, malgré tout, j'aimerais essayer d'obtenir le pardon.
Il tendit faiblement la main vers Aria.
— Approche…
Hésitante, Aria fit quelques pas en avant. Edgard referma doucement ses doigts autour de sa main.
— Je suis désolé, ma fille… Pour tout le mal que je t'ai fait.
Aria ne dit rien, le cœur lourd.
— Et pas seulement à toi, ajouta-t-il. J'ai aussi causé du tort à Esme… et au roi du royaume de Stregon.
Aria releva la tête, intriguée.
— Que veux-tu dire ?
Edgard inspira difficilement avant de murmurer :
— Si vous êtes attaqués par eux… c'est de ma faute.